Résumé:
Ce travail est consacré à l’étude des pucerons des agrumes et leurs
interactions avec la plante hôte et les communautés d’insectes entomophages
dans la région de la Mitidja centrale où les deux espèces Aphis spiraecola et A.
gossypii cohabitent et occasionnent des dégâts sur les clémentiniers. Durant trois
années d’étude entre 2010 et 2012, les abondances aphidiennes sur le
clémentinier ont semblé être influencées par les variations de température et des
quantités de pluie. L’abondance des adultes ailés et aptères des deux aphides,
d’insectes auxiliaires et des paramètres du métabolisme énergétique ont été
mesurés chaque semaine. En parallèle, les glucides solubles, les acides aminés
libres totaux, la proline libre, la callose et les tannins condensés ont été quantifiés
dans les feuilles saines et infestées. La structuration des populations des deux
aphides a montré des corrélations positives et hautement significatives entre les
abondances des différentes formes biologiques durant les trois poussées de sève.
L’analyse des décalages temporels entre les teneurs des réserves glucidiques et
lipidiques des deux aphides et celles des constituants foliaires montre que la
teneur en acides aminés favorise l’abondance des pucerons. Cependant, ni la
callose et les tannins condensés, ni les insectes auxiliaires ne semblent moduler
les populations d’aphides. La teneur en glucides foliaires est positivement corrélée
avec l’abondance d’A. spiraecola mais pas celle d’A. gossypii qui est par contre
défavorisée par de fortes teneurs en proline. La plus forte abondance d’A.
spiraecola sur le clémentinier par rapport à A. gossypii pourrait donc s’expliquer
par une meilleure tolérance aux fortes teneurs en proline et une meilleure
conversion des métabolites énergétiques foliaires.
De Juin 2012 à Juin 2013, l’inventaire des communautés d’arthropodes
bénéfiques identifiées dans les vergers agrumicoles, a mis en évidence 2776
individus répartis en 8 ordres, 25 familles et 55 espèces. Par rapport à la richesse
en Diptera, Hemiptera, Neuroptera, Dermaptera et Mantodea (pour un total de 2 à
4%), les Hymenoptera étaient les plus représentés avec 18 espèces (33 %) suivi
par les Coleoptera avec 17 espèces (31 %) et les Aranea avec 12 espèces
prédatrices (22 %). Globalement, cinq groupes trophiques ont été distingués au
cours de l’année : les généralistes représentés surtout par les fourmis et les
araignées, les espèces aphidiphages, coccidiphages et aleurodiphages, ainsi que
les parasitoïdes de cicadelles. A travers l’application de diverses analyses
multivariées, nous avons mis en évidence des différences saisonnières de
composition entre les assemblages durant le développement phénologique du
clémentinier. De plus, les diversités et richesses des assemblages trophiques
saisonniers sont significativement différentes ce qui explique un ordre d’installation
différent des arthropodes bénéfiques dans les vergers. Les principales espèces
qui participent aux différences de composition au sein d’un même groupe
fonctionnel saisonnier sont Cales noacki, Aphidoletes aphidimyza, Metaphycus
flavus, Chrysoperla carnea, Aphytis melinus, Rodolia cardinalis, Metaphycus
helvolus, Scymnus subvillosus et Episyrphus balteatus. Ce complexe d’espèces
entomophages semble particulièrement lié à la prédominance et l’abondance de
leurs proies hôtes spécifiques comme Aleurothrixus floccosus, Aphis spiraecola,
Aphis gossypii et Icerya purchasi.