Résumé:
Les Culicidae ou moustiques ont une grande importance médicale et
vétérinaire. Ils sont considérés comme un problème de santé publique, à cause de
leur nuisance et de leur capacité à transmettre des agents pathogènes. L’élimination
des maladies parasitaires à transmission vectorielle repose sur la lutte contre le
vecteur. Cette lutte ne peut être efficace sans un bon programme de contrôle de ces
vecteurs.
L’espèce Culex pipiens, vecteur compétent des arbovirus tels que le Virus du
West Nile (VWN) et le Virus de la Fièvre de la Vallée de Rift (VFVR), sont largement
répandus en Algérie. En absence de vaccins efficaces, l’utilisation des insecticides
demeure le seul moyen de contrôle de ce vecteur. La lutte anti-vectorielle, reste l'outil
le plus efficace et le plus accessible pour contrôler les populations de vecteurs.
Malheureusement, l’utilisation intensive des insecticides chimiques a conduit
au développement de la résistance chez ce moustique. Il existe plusieurs
mécanismes par lesquels ces insectes résistent aux insecticides, les deux
mécanismes les plus étudiés sont : la modification de la cible d’insecticide, ainsi que
l’augmentation de la production des enzymes de dégradation de ces insecticides.
Peu de donnée sur les mécanismes de résistance sur le Culex pipiens en Algérie.
Cependant, aucune donnée n’est présente sur les mécanismes de résistance chez
les populations naturelles de Culex pipiens en Algérie. De ce fait, notre objectif était
d’étudier pour la première fois la mutation ace-1 G119S ace-1 associée à la
résistance aux organophosphorés (OP) et aux carbamates (CX) dans l’Est algérien.
Dans un premier volet et afin de révéler l’espèce la plus dominante et vectrice
de maladie, nous avons réalisé un inventaire des moustiques pour la première fois
dans la wilaya de Khenchela. La collecte a été faite dans sept régions durant la
période de Mai 2020 jusqu’au Septembre 2021 .L’étude de la systématique a révélé
la présence de 10 espèces ,appartenant à cinq genre: Culex pipiens (Linneaus,
1758), Culex territans (Walker,1856), Culex theileri (Theobald, 1903),Culex modestus
(Ficalbi,1890), Culiseta longiareolata (Macquart,1838), Culiseta annulata (Schrank,
1776), Aedes geniculatus (Olivier, 1791), Aedes vexans(meigen,1830),
Orthopodomyia pulcripalpis (Rondani,1872), Uranotaenia unguiculata
(Edwards,1913). De cet inventaire il ressort que l’espèce Cx. pipiens est la plus
abondante (44.26%) suivi by Cs. longiareolata (39.57%). Ce résultat donne des
informations très importantes sur la biodiversité, la répartition et la relation entre les
facteurs écologiques et l’abondance des espèces, pour un programme de contrôle
efficace.
Dans un deuxième volet, nous avons évalué dans un premier temps le statut
de sensibilité chez les populations de la province d’Annaba vis-à-vis du téméphos
puis calculer les fréquences de gènes de résistance ace-1 (G119S). Les larves de
Culex pipiens , de la wilaya d’Annaba (Annaba ville, Sidi Ammar, El Hadjar, Hdjer Ed
Diss et Oued el Anneb), ont été testées pour leur sensibilité vis-à-vis du temephos
selon le protocole de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Les résultats des
bioessais ont montré que chez les 5 populations étudiées le taux de résistance est
variable selon la région. Par ailleurs, les femelles adultes collectées, de la wilaya
d’Annaba, Batna et Khenchela ont été testées pour la recherche de la mutation ace1 par PCR-RFLP. L'analyse des génotypes d’ace-1 a montré que les fréquences
alléliques du 119S présentent presque chez toutes les populations . Les fréquences
des allèles de résistance ace-1 étaient relativement modérées (< 0,4). Leurs
analyses dans les trois wilayas ont révélé que la mutation G119S a tendance à être
plus fréquente dans les sites urbains que dans les sites ruraux, ce qui confirme
l’impact de l’urbanisation sur la sélection des gènes de résistance. Ces résultats
mettent en évidence l’urgence de gérer le problème de résistance aux insecticides
chez la population naturelle du moustique Culex pipiens.
A notre connaissance, les fréquences de cette mutation sont étudiées pour la
première fois en Algérie dans les populations naturelles de Culex pipiens. Ces
résultats fourniront des informations importantes qui pourraient aider les autorités
sanitaires du pays à développer leurs programmes de lutte anti-vectorielle d’une
manière plus adaptée à cette espèce de moustique, vecteur potentiel des arbovirus.